Victoria Times-Colonist - December 14, 2014
Vancouver Sun - December 18, 2014
Windsor Star - December 19, 2014
Calgary Herald - December 19, 2014
Nationalnewswatch - December 19, 2014
Huffington Post - December 22, 2014
Charlottetown Guardian - December 22, 2014
Hamilton Spectator - January 2, 2015
Montreal Gazette - January 5, 2015
par Colin Kenny
Si vous pensiez encore que notre pays était à l’abri de la radicalisation et de la violence, les évènements récents vous ont sûrement fait changer d’avis.
Les deux attaques terroristes menées au mois d’octobre et la participation de plus de 130 citoyens canadiens à la campagne militaire du groupe armé État islamique révèlent clairement qu’un nombre de plus en plus grand de nos compatriotes s’oriente vers un extrémisme violent. La multiplication récente de ce type d’incidents ne se limite pas au Canada, mais s’inscrit dans un phénomène plus large.
Même si al-Qaïda a été décimé, Internet facilite la diffusion d’une propagande extrémiste qui influence négativement de jeunes Canadiens à la recherche d’un idéal. Pour certains d’entre eux, l’exposition à ces idées tordues mène à une issue violente.
Les services de sécurité canadiens font de leur mieux, malgré des ressources limitées, pour repérer les individus radicalisés et atténuer la menace qu’ils posent pour la sécurité. Mais la situation est trop complexe pour qu’on puisse mettre fin au problème simplement en procédant à des arrestations.
En effet, le processus de radicalisation est souvent subtil, et la police a de la difficulté à repérer les extrémistes avant qu’il soit trop tard. Si l’individu radicalisé n’a jamais eu de démêlés avec la justice, c’est encore plus difficile. Contrairement à ce qui se passe lors d’un complot terroriste d’envergure, lorsqu’un extrémiste agit seul, il est beaucoup plus difficile pour les autorités d’intercepter les communications qui pourraient révéler ses intentions.
Par ailleurs, une intervention antiterroriste robuste n’est pas toujours l’approche idéale. Lorsque c’est possible, il est plus sûr, plus rapide et moins coûteux de dissuader une personne à risque de s’engager plus avant sur le chemin de l’extrémisme avant qu’elle commette un crime, et cette dissuasion est souvent plus efficace si elle est l’œuvre des membres de sa propre communauté.
Les services de sécurité canadiens sont tout à fait conscients de cette réalité et adaptent leurs méthodes à la complexité de la menace, notamment grâce à une approche communautaire; ils discutent avec les leaders de diverses communautés des façons de coopérer afin de détourner les Canadiens du radicalisme. La collaboration de la population est essentielle à l’établissement d’un lien de confiance entre les différents intervenants et à l’échange de renseignements.
Cela met en lumière le rôle que chacun – qu’il soit leader communautaire, parent, enseignant, médecin ou travailleur social – peut jouer dans la prévention de la radicalisation en agissant lorsqu’une de ses connaissances s’oriente vers l’extrémisme. Les agents de police, les gardiens de prison et les agents de libération conditionnelle devraient être aussi à l’affût des signes de radicalisation. Mais pour que ce soit possible à grande échelle, nous devons tous être en mesure de reconnaître ces signes. Les experts en sécurité nationale s’entendent pour dire que les caractéristiques suivantes montrent qu’un individu se radicalise :
1. Il abandonne brusquement ses amis et ses proches. 2. Dans les occasions de plus en plus rares où il voit sa famille, il les sermonne à cause de leur comportement soi-disant impie; il traite par exemple son propre père d’infidèle parce qu’il consomme de l’alcool, ou sa sœur de prostituée parce qu’elle ne porte pas le bon voile. 3. Il cesse de participer à des activités qui occupaient auparavant une grande partie de son temps, par exemple des activités sportives ou communautaires. 4. Il croit avoir trouvé la seule voie vers l’illumination, habituellement sous la forme d’un sunnisme radical, et tous ceux qui ne suivent pas cette voie sont pour lui sans valeur. 5. Souvent, il exprime de plus en plus de haine et d’intolérance envers les personnes qui n’ont pas les mêmes croyances. 6. Il rejette donc les musulmans appartenant à des sectes différentes, de même que les imams qui condamnent la violence. 7. Il refuse de remettre en question ses idées. 8. Il tourne le dos à la vie qu’il menait avant sa radicalisation. 9. La navigation sur des sites pornographiques, djihadistes, violents ou antigouvernementaux occupe une part de plus en plus grande de ses journées (12 à 16 heures). 10. Il adopte un comportement obsessif, se destine au martyr et souhaite l’apocalypse.
Tous les djihadistes auxquels se sont intéressées les autorités montrent plusieurs de ces caractéristiques, sinon toutes. Cependant, une personne qui présente quelques-unes de ces caractéristiques n’est pas encore nécessairement entièrement radicalisée.
C’est pour cette raison que les autorités doivent souvent suivre plusieurs pistes avant de repérer un terroriste.
Afin d’endiguer la radicalisation des Canadiens, nous devons nous assurer de déployer nos efforts de façon inclusive, avec la participation de toutes les communautés. La grande majorité des musulmans canadiens sont aussi inquiets que leurs concitoyens, car ils sont souvent les premiers à subir le mépris des extrémistes de leur communauté.
Le problème de la radicalisation est grave au Canada, mais en apprenant à reconnaître les signes montrant qu’un extrémiste s’oriente vers une activité criminelle, nous pouvons agir pour réduire la menace.
[[Colin Kenny a présidé le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Kennyco@sen.parl.gc.ca]